mercredi 2 novembre 2011

LA GLOBALISATION DE LA SURVEILLANCE

Voici une entrevue donnée en 2010 par Armand Mattelart, à Article11.info.  Le communicologue y dresse une généalogie des techniques, technologies et savoirs qui ont, à partir de la fin du XVIIIe siècle, présidé à la définition, à la normalisation, à la surveillance et au contrôle des citoyens par les États, avec l’avènement d’un art technocratique de gouverner. Cette entrevue fait suite à la parution de l’essai La globalisation de la surveillance.

L’ouvrage de Mattelart rapporte notamment l’évolution des techniques d’identification biométrique, le développement des principes de gestion de la société de masse et la naissance de la technocratie à la suite de la Première guerre mondiale. Il décrit également la mise de l’avant, aux États-Unis, de la doctrine de la sécurité nationale, lors de la Guerre froide, de la légitimation d’un État d’exception permanent et de la mobilisation en un bloc des trois corps d’armée, des politiques intérieure et extérieure, de l’économie et de la recherche scientifique appliquée au nom de la lutte contre le nouvel ennemi idéologique qu’est l’Union soviétique.  
Mattelart fait aussi état d’une nouvelle forme de conflit, la guerre de libération nationale, dans le contexte de la décolonisation, qui prend la forme d’insurrections. Celles-ci se voient opposer des tactiques de subversion, d’incitation à la corruption et d’infiltration menées par les États-Unis et les anciens pays colonisateurs, tactiques contre-insurrectionnelles qui mobilisent les savoirs issus de l’anthropologie, de la psychologie, de la sociologie, de la politologie et de l’économie.   

À partir des années 1970, la crise de la démocratie libérale, la perte de légitimité du pouvoir politique et le mouvement de globalisation appellent une nouvelle approche dans l’art de gouverner, qui passe par l'érection d’une société de l’information. Survient alors, avec les capacités inédites de gestion et de stockage des données offertes par l’informatique, un état de vulnérabilité pour les citoyens, dans la mesure où la moindre faille dans les systèmes peut entraîner la dissémination de leurs données personnelles.     
La chute de l’Union soviétique, au début des années 1990, confirme le statut de superpuissance des États-Unis. Le maintien de ce statut passe alors par la domination sur les plans économique, technologique, militaire et culturelle, maintien rendu possible par la maîtrise des réseaux d’information et de communication, nerfs de la nouvelle guerre à mener contre les États voyous. L’information et le savoir deviennent plus que jamais cruciaux sur les plans politique et économique. De plus, ce seront d’importantes armes dans la lutte post-11-septembre contre le terrorisme, ennemi du troisième millénaire, à dimension globale.   

À partir de cette nouvelle ère, les formes de surveillance, de contrôle et de sécurité adoptées par les États-Nations se manifestent à travers une technologie toujours plus intelligente et automatisée, au fait des innovations en matière d’informatique, mais également de génétique.

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